Mon proche est maintenant en établissement : comment retrouver un équilibre ?

Bonjour à tous. Si vous avez cliqué sur cette vidéo, c’est probablement qu’une personne qui vous est chère – votre conjoint, l’un de vos parents, un frère, un sœur – est maintenant en EHPAD. Peut-être cette transition s’est-elle faite sereinement, peut-être a-t-elle été brutale et mise en place dans l’urgence. Peut-être votre proche était-il d’accord avec ce projet ou peut-être non. En ce qui vous concerne, cela n’a sans doute pas été une décision facile à prendre.

Et si cela vous permet de récupérer d’un épuisement physique et mental souvent avancé, de nouvelles questions se posent : quelle relation réinventer avec mon proche ? quelles relations avec les professionnels de l’établissement ? Quel nouvel équilibre pour moi ?

Trois grandes questions que nous allons aborder dans cette vidéo.

1. Une relation à réinventer avec votre proche

Quelle relation réinventer avec votre proche dont la santé s’est dégradée ?
Pour avoir accompagné de nombreux aidants, je sais à quel point cette étape peut-être difficile à vivre. Je peux aussi témoigner de belles histoires : Sylvie par exemple qui a fini par se résoudre à se séparer de son mari, épuisée d’avoir à s’en occuper chaque nuit, de passer ses matinées à nettoyer la maison car il était devenu incontinent. Un mois après, elle partageait sa surprise de réaliser que c’était finalement une grande chance pour elle et son mari que désormais tous les soins de toilette soient assurés par des professionnels bienveillants : ils pouvaient maintenant savourer de longs moments l’un à côté de l’autre devant la fenêtre de l’EHPAD, en lisant ou fermant les yeux au soleil en se tenant la main.

De la même manière, une nouvelle page de relation s’ouvre pour vous et votre proche. C’est le moment de vous reposer cette question : qu’avez-vous envie de vivre avec lui aujourd’hui ?

Pour nourrir votre réflexion, je vous propose de vous inspirer du grand spécialiste de la communication familiale, Gary Chapman.

Gary Chapman nous invite notamment à prendre conscience de notre langage de l’amour préféré et celui de notre proche. Il souligne que nous n’avons généralement pas le même langage de l’amour préféré. Or nous avons tendance à exprimer notre amour à l’autre dans notre propre langage alors que ce n’est pas forcément celui qui le comble le plus ! Pour approfondir cette piste, je vous invite à regarder la vidéo “comment préserver ma vie de couple ?”.

Autre conseil de Gary Chapman : Pour renforcer et enrichir la qualité de votre relation, il insiste sur l’importance de ne pas échanger seulement sur les faits. Mais d’échanger également sur comment nous les avons vécus.
Ne vous arrêtez donc pas à demander à votre proche « quel était le menu aujourd’hui au restaurant ? Qu’as-tu fait aujourd’hui ? ». Ajoutez des questions sur les idées et émotions que cela a suscité, et sur ce que vous avez vécu et ressenti de votre côté pendant votre journée.
Certains n’osent pas aller sur ce registre des émotions, craignant notamment que leur proche leur expriment leur mal-être. Cela peut arriver que votre proche se plaigne de ne pas être bien dans l’établissement. Que faire dans ce cas ?

Et si votre proche vous répète que cela se passe mal ?
Demandez déjà l’avis des professionnels de la maison ou d’autres proches venant régulièrement : ont-ils eu le même retour négatif votre proche, leur a-t-il dit la même chose qu’à vous ? Qu’est-ce qu’ils en pensent, sur quels points observent-t-il que cela se passe très bien ou au contraire moins bien ?

Rappelez-vous ensuite pourquoi la décision d’entrée en EHPAD a été prise. Vous n’avez sans doute pas été seul à prendre cette décision, probablement recommandée par les avis médicaux.
Listez aussi tous les aspects positifs, tous les bénéfices pour votre proche et pour vous depuis qu’il est maintenant pris en charge ici.

Enfin, si votre proche vous demande régulièrement de partir, de sortir, organisez une sortie ponctuelle chez vous. Cela peut avoir des conséquences très positives : souvent le proche est heureux de revenir chez lui ou chez vous, mais réalise aussi souvent à quel point il est fatigué et finalement heureux de rentrer le soir à l’établissement.

Et si vous faisiez signe à d’autres proches ?
L’entrée en établissement peut-être aussi l’occasion de davantage associer votre entourage aux visites. C’est le moment de recenser toutes les personnes qui apprécient votre proche : famille mais peut-être aussi voisins et amis. Si vous n’osez pas leur proposer de venir pour une visite, peut-être n’oseront ils jamais prendre cette initiative ?
Vous pouvez également réfléchir à vous coordonner pour alterner les visites? Et aller plus loin en partageant sur un groupe WhatsApp par exemple l’actualité de votre proche pour garder tout le monde au courant ?

2 Développer de bonnes relations avec l’établissement

Parlons maintenant de vos relations avec l’établissement : peut-être cela se passe-t-il très bien, mais peut-être êtes-vous insatisfait de la prise en charge qui ne correspond pas à ce que vous attendiez, frustré d’avoir des interlocuteurs changeants et peu disponibles, méfiant après tout ce que vous avez entendu sur les EHPAD, en colère car vos demandes ne sont pas prises en compte, etc. ?

Voici quelques clés pour que cela se passe durablement au mieux avec l’établissement :

a. je vous conseille de lire dès le départ le règlement intérieur et de savoir qui sont vos interlocuteurs.
Demandez s’il existe un trombinoscope, essayez de rencontrer chacun – directeur, infirmière coordinatrice, médecin, psychologue, animateur : demandez-leur quelles sont leurs missions par rapport à votre proche, quand est-ce que vous pouvez les joindre, faire le point. N’attendez surtout pas que les choses soient tendues pour les rencontrer et leur dire ce qui est important pour vous.

b. Deuxième conseil, appuyez-vous sur le projet de vie personnalisé de votre proche.
Il s’agit d’un dispositif obligatoire dans tout établissement médico-social, ce projet doit définir ce qui est important pour votre proche et la manière dont cela va être mis en place très concrètement. C’est un dispositif précieux pour installer et garder chaque nouveau résident dans une dynamique de vie et d’envie. Il doit être réactualisé en tant que de besoin. Certains établissements le définissent sans beaucoup approfondir, le restreignant parfois à la dimension des soins.
Demandez donc ce qu’il en est à vos interlocuteurs : ce dispositif est une belle occasion de dialogue constructif et régulier avec l’établissement. Je vous conseille de vous y préparer en listant sous forme de verbes ce que votre proche a toujours aimé, et ce qu’il lui procure du plaisir. Peut-être est-ce apprendre, jouer, faire les choses de ses mains… J’ai eu l’occasion par exemple de préciser avec une dame très curieuse son souhait de réapprendre les langues et parler anglais : un petit groupe de conversation s’est ainsi monté avec trois résidentes pour le plus grand plaisir de chacune, il a même donné lieu à une nouvelle activité d’animation dans établissement.

c. Sachez que vous pouvez vous impliquer dans la vie de l’établissement, en rejoignant le Comité de la Vie Sociale. Il s’agit d’une instance élue qui représente les résidents, familles et professionnels. Il se réunit au moins trois fois par an et donne son avis sur tout ce qui concerne la vie de l’établissement dans le but d’améliorer le quotidien des résidents.

d. Pour différentes raisons, les relations peuvent se tendre avec les professionnels.
Voici une technique très utile et facile à mettre en œuvre pour apaiser des relations tendues : la communication non violente. Selon son auteur, Marshall Rosenberg, de la violence peut se développer dans nos relations si nous n’exprimons pas suffisamment nos émotions et nos besoins.
Vous pourrez retrouver cette méthode simple et puissante dans la vidéo « Gérer les relation avec les professionnels »

3 Quel nouvel équilibre pour vous ?

Nous avons parlé de la relation avec votre proche, avec les professionnels. Je vous propose maintenant de terminer en réfléchissant à vous.
Quelles sont les émotions qui vous habitent quand vous pensez à votre proche dans sa maison de retraite ? Prenez le temps de les accueillir. Essayez de démêler celles qui sont positives et celles qui sont négatives.

Si vous ne ressentez que des émotions négatives, je vous invite à réfléchir quelques instants à ce qui peut vous empêcher de vivre sereinement cette nouvelle page de vie : nommez ces raisons. Est-ce la difficulté à accepter la situation actuelle et la maladie, le sentiment d’avoir « abandonné » votre proche, encore un doute sur le fait qu’il aurait pu en être autrement? Identifier et formuler les peurs et difficultés permet de commencer à les dépasser.
Si vous sentez un nœud trop douloureux, n’hésitez pas à en parler avec le psychologue de l’EHPAD qui a aussi un rôle d’accompagnement des familles.

Et si vous vous sentez prêt à aborder et écrire cette nouvelle page de vie, je vous propose maintenant un dernier exercice : prévoyez au moins 15 minutes et installez-vous bien confortablement. Prenez une feuille blanche et écrivez la liste de vos envies. Si cela ne vient pas spontanément, repensez à ce que vous aimiez faire enfant, identifiez ce qui ne vous prend pas d’énergie mais vous en redonne à tous les coups.
Puis entourez vos trois premières envies. Pour chacune, réfléchissez à une chose que vous pourriez faire dès aujourd’hui pour vous accorder un bon moment. Je vous souhaite de bien en profiter. N’hésitez pas à reprendre cette liste régulièrement pour l’enrichir.

Nous arrivons au terme de cette vidéo. Si elle vous a été utile, pensez à la partager !
Et si vous souhaitez approfondir et échanger sur votre situation d’aidant, renseignez-vous sur les accompagnements individuels et les ateliers proposés par l’association Nouveau Souffle. Ces accompagnements sont pris en charge.

À bientôt peut-être, prenez soin de vous.